L’inflation cosmique est une phase d’expansion accélérée de l’univers primordial. Elle a lieu à très haute énergie, plusieurs ordres de grandeur plus élevée que celles sondées dans les accélérateurs de particules. A ces échelles, il est attendu que de multiples champs physiques jouent un rôle dans la dynamique de l’univers.

Cependant, toutes les observations astrophysiques disponibles sont compatibles avec une phase d’inflation pilotée par un champ unique, et aucune indication de la présence de plusieurs champs n’a jamais été rapportée. Cette apparente contradiction est un des mystères les plus intrigants de la cosmologie moderne. Ce travail de recherche, mené par Koki Tokeshi (doctorant à l’université de Tokyo) et Vincent Vennin (chercheur CNRS) au Laboratoire de Physique de l’Ecole Normale Supérieure de Paris, et publié dans Physical Review Letters, révèle que l’explication se cache dans des effets de mécanique quantique.

En effet, pendant l’inflation, les champs de matière sont sujets à des fluctuations quantiques, dont l’effondrement gravitationnel donne ensuite naissance aux grandes structures cosmologiques. Ces fluctuations ont été observées avec grande précision, notamment dans le fonds diffus cosmologique.
Leur existence implique que différents points de l’espace sont soumis à différents taux d’expansion, et engendrent des volumes plus ou moins grands de l’univers post-inflationnaire.

En utilisant le formalisme des processus stochastiques contraints, l’article montre que les régions qui grossissent le plus sont celles qui réalisent l’inflation le long du champ le plus léger, c’est à dire dans des réalisations où les champs lourds sont rapidement supprimés. Puisque ces régions sont celles qui contribuent le plus au volume final de l’univers, cet effet de sélection explique pourquoi un observateur local, tel que nous, a une plus forte probabilité d’observer une phase d’inflation à un champ dans son voisinage local.

Dans un espace-temps en expansion, la pondération par le volume en présence de diffusion quantique établit donc la phénoménologie mono-champ comme une prédiction générique de l’inflation.

Inflation pilotée par deux champs ϕ1 et ϕ2 (dans un potentiel quadratique). En présence de
fluctuations quantiques, les trajectoires dans l’espace des champs sont stochastiques, chaque point
de l’espace étant sujet à une réalisation différente. Le long des courbes bleues l’espace est étiré par
un facteur e500, et par e200 le long des courbes rouges (la ligne noire est la moyenne des réalisations
rouges). Les régions de l’espace qui inflatent le plus sont déviées vers ϕ1 et apparaissent donc
comme mono-champ du point de vue d’un observateur futur.

 

  

En savoir plus :
https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.132.251001

Informations complémentaires :
Laboratoire de physique de L’École normale supérieure (LPENS, ENS Paris/CNRS/Sorbonne Université/Université de Paris)


Auteur correspondant : Vincent Vennin
Contact communication : L’équipe de communication